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Le syndrome de l'imposteur et moi

15 mai 2021

Avez-vous déjà entendu parler des histoires d'amour passionnées ? Celles qui vous tombent dessus, vous emportent dans un tourbillon d'émotions sans vraiment vous laisser le choix ? Celles qui vous font vivre des moments intenses de plénitude et d'amour ? Eh bien, je crois avoir vécu une histoire similaire, avec toutes ces caractéristiques. La différence est qu'elle était plutôt toxique.
J'ai dû la quitter pour m'en rendre compte. Et ce n'est finalement pas tellement romantique. Je vais m'atteler à vous raconter cette relation qui a failli détruire une partie de ma flamme.

Pendant plusieurs années, jusqu'à récemment, j'entretenais une relation particulière avec un monsieur dont je ne connaissais pas le vrai nom. Enfin, je ne savais pas vraiment comment l'appeler et je ne savais pas vraiment qu'il existait. Nous cohabitions, nous nous aimions et c'était très beau. Ou plutôt magnifiquement moche.

Avez-vous entendu parler du syndrome de l'imposteur ? Non ? Bah tant mieux. Parce que monsieur Imposteur ne peut jamais être la meilleure rencontre que vous pourriez faire dans votre vie.

Monsieur Imposteur débarque de nulle part, pose ses valises sans demander la permission. Il s'infiltre dans votre vie de manière mesquine. Monsieur Imposteur est fidèle. Il vous quitte difficilement : si vous n'y prenez pas garde, c'est à la vie à la mort, dans le meilleur comme dans le pire, surtout le pire.

Monsieur Imposteur est comme une sangsue : il vous suce le sang. Il ne se gêne pas pour vous dépouiller de vous énergie vitale. Monsieur Imposteur est une plaie. Et il est le genre d'ex qui, peu importe à quel point vous essayez de lui trouver des qualités, vous donne des raisons de parler en mal de lui. Vous n'y pouvez rien. Sa nature est telle que vous ne pouvez faire autrement.

Monsieur Imposteur va vous faire culpabiliser d'être aussi mauvais. Alors que vous n'avez rien fait. Un petit tour sur Google, Wikipédia nous renseigne assez vite sur qui est Monsieur Imposteur :

« Les personnes atteintes du syndrome de l'imposteur, appelé aussi syndrome de l'autodidacte, phénomène de l'imposteur, expérience de l'imposture, expriment une forme de doute maladif qui consiste essentiellement à nier la propriété de tout accomplissement personnel. Ces personnes rejettent donc plus ou moins systématiquement le mérite lié à leur travail et attribuent le succès de leurs entreprises à des éléments qui leur sont extérieurs (la chance, leurs relations, des circonstances particulières). Elles se perçoivent souvent comme des dupeurs-nés qui abusent leurs collègues, leurs amis, leurs supérieurs et s'attendent à être démasquées d'un jour à l'autre. »

Si Monsieur Imposteur a touché plusieurs domaines de ma vie, il y en a un dans lequel il a fait des ravages : l'écriture.

Savez-vous à quel point j'aime écrire ? Vous ne pourriez vous en douter si je ne vous l'expliquais pas. Au moment où j'écris ces mots par exemple, j'en tire un plaisir, une satisfaction et un sentiment de plénitude indescriptible. Je n'aime pas écrire. J'adore écrire. Et il semblerait que je sache le faire.

« Tu écris bien ! ». Oui, j'admets que j'écris bien. Pendant, longtemps, j'ai renié mon talent et ma capacité à écrire. Aujourd'hui, j'arrive à le dire et à l'assimiler : « J'ai un talent pour cela ». Je ne me sens pas coupable de le dire pour ne pas paraître orgueilleuse sur le sujet parce que je le suis. Mais cela n'a pas toujours été le cas. La définition que Wikipédia a gentiment donné s'appliquait à moi.

J'écris depuis mon plus jeune âge. Mes parents se rappellent mieux que moi quand j'ai commencé à vouloir écrire et à le faire. Mes souvenirs quant à eux, remontent à quand j'avais neuf ou dix ans et que je volais des cahiers pour écrire des histoires — que je ne finissais jamais, allez savoir pourquoi —. 

Je me suis levée un matin autour de ma quatorzième année — j'en ai dix-sept actuellement — et ai commencé à devenir auto-critique à outrance de ce que j'écrivais. Je n'étais jamais, au grand jamais satisfaite de ce que je produisais. Les compliments ne faisaient effet que quelques minutes même si je le dissimulais bien.

Je trouvais cela trop facile. J'avais l'impression de ne pas fournir assez d'efforts, de devoir tout reprendre. Je pensais devoir modifier ceci et cela. Je voulais à tout prix qu'on me dise que je n'ai pas tort. J'étais rentrée dans un cercle vicieux de recherche de validation de mes œuvres où je voulais qu'on dise "tu as bien écrit". 

Mais quand j'obtenais la validation tant attendue, elle n'était jamais assez suffisante. Il m'en fallait plus, encore plus, toujours plus. Et quand je l'obtenais, ce n'était jamais assez. Ce n'était jamais assez sincère, jamais assez réel, jamais assez objectif, jamais assez ci ou ça. C'était tout simplement frustrant.

J'en étais arrivée à un stade où j'acceptais mieux les critiques que les compliments et qu'à force de m'auto-critiquer à outrance, aucune d'entre elles ne me surprenait. J'y pensais souvent déjà. Le plus aberrant est que même si j'y avais déjà pensé — maintes fois — et que je m'y étais résignée, je ne faisais pas grand-chose pour changer. Je ne me sentais pas assez à la hauteur pour le faire.

Je me dénigrais sans cesse. J'étais dans un mécanisme où je m'attendais à tout moment à me casser la gueule. Et quand cela arrivait, j'étais en mode « Qu'est-ce que je disais ? Je le savais. Mieux vaut abandonner. » Mais au lieu d'abandonner, je reprenais parce que, au fond de moi, j'aimais ce que je faisais. Je ne pouvais m'empêcher de nourrir ce désir d'être validée. Par qui ou quoi ? Je ne saurai le dire exactement.

Je me comparais sans cesse à d'autres auteurs, m'extasiais devant leurs œuvres. Je me tirais des missiles de dévalorisation. Je me résignais à n'être qu'une personne sans talent qui force un peu trop sur l'écriture parce qu'elle veut raconter des histoires. Et le plus paradoxal dans cette histoire est que j'écrivais peu. À quoi bon écrire si j'allais de toutes les façons écrire de la daube ? C'est ainsi que je le voyais.

Qui me chuchotait ces idées ? Je ne saurais dire exactement. Je m'usais en passant par des émotions contradictoires en très peu de temps et de manière intense. J'avais l'impression d'être une moins-que-rien même si je considérais l'écriture comme mon seul réel talent. Je procrastinais à mort pour ne pas à avoir à me décevoir. 

Je n'arrive même plus à mettre les mots sur ce que je ressentais à cette époque. Tout ce que je sais, c'est que c'était horrible à vivre. Je présentais aux gens une estime de soi de façade. J'avais l'impression d'être une arnaque sur pattes. J'avais extrêmement peur qu'on le remarque ou qu'on se rende compte que j'étais une hypocrite. Ça passait parfois pour des caprices.

Monsieur Imposteur m'aimait beaucoup, m'a beaucoup aimé et tente parfois de revenir dans ma vie. Mais voilà, je ne l'aime plus ! Comment est-ce que j'ai réussi à rompre ? Je ne saurai pas situer la période exacte. Autour de la fin de ma seizième année, je dirais ?

De manière fortuite, j'ai intégré un cercle de personnes inspirantes, déterminées, actives, expérimentées. Je voyais en elles des représentations de » tout ce que je voulais être. À force d'apprendre à les connaitre, je me suis rendue compte que je ne pouvais pas prétendre vouloir les ressembler sans avoir un minimum confiance en moi.

Je n'avais même pas conscience que je n'avais pas confiance en moi. Je n'avais pas conscience de ce que c'était et de ce que ça devait être pour moi. Rencontrer ces gens, les côtoyer m'a donné un déclic. Un processus s'est enclenché. Un processus fait de hauts et de bas pendant lequel, de gré ou de force, j'ai dû apprendre à me connaître. Un cheminement pendant lequel j'ai levé des barrières qui vivaient avec moi et en moi sans que je ne m'en rende compte.

Je n'ai pas fini. Il me reste du chemin à parcourir, mais je sais que j'ai fait le nécessaire. Je n'ai appris réellement l'existence du syndrome de l'imposteur que récemment, à travers une amie à qui je dédie cet article parce qu'elle est la raison pour laquelle je l'écris.

En faisant une introspection, je me suis rendu compte qu'à un moment, je suis passée par là. Je n'ai pas toujours été celle que je suis aujourd'hui. Je n'ai pas toujours pris un plaisir total à écrire. Je ne me suis souvent soucié de ce que les gens pourraient penser. Écrire quelque chose de mauvaise qualité a été une crainte qui m'a bouffé la vie.

Je suis allée faire un tour dans mes anciens écrits — les sauvegardes, c'est la vie — et je me suis rendu compte que j'écrivais bien. Il y avait un total désaccord entre ce que je pensais de ces écrits-là à cette époque et ce que j'étais en train de lire. J'ai réalisé l'ampleur de ce que Monsieur Imposteur a fait dans ma vie. 

J'ai failli pleurer parce que j'avais l'impression d'avoir gâché des années. J'avais l'impression de vivre dans une illusion tellement profonde. Elle aurait pu me détruire à la longue si les circonstances ne m'en avaient pas sortie. J'ai réalisé que Monsieur Imposteur était toxique et que, comme beaucoup d'autres personnes, il a abusé de moi et de mon estime de moi-même. J'ai réalisé que ma peur incontrôlée de l'échec à une époque, mon trop-plein d'insécurités étaient juste des manœuvres de Monsieur Imposteur pour détruire la flamme en moi.

Je suis reconnaissante du fait que mon destin ait pris des tournants inattendus ces derniers mois et que même avant que je ne me rende compte de sa présence, Monsieur Imposteur ait été chassé. Ce que j'accomplissais n'était ni un coup de chance, ni le fruit du hasard. C'était juste moi et ma plume plutôt belle. C'était mon cerveau, du travail et je n'ai pas de raison de nier que c'est mon domaine !

Je suis toujours autocritique mais à un degré raisonnable et je suis emplie de bienveillance envers moi-même. J'accepte toujours aussi bien les critiques quand elles sont constructives parce que je suis animée par un désir de mieux faire et d'affiner ma plume. Je ne cherche pas une raison supplémentaire pour me dénigrer. J'espère continuer comme cela.

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