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Je me suis coupé les cheveux...

5 mai 2024

Je n’aurais jamais cru dire ça en de telles circonstances, mais je me suis coupé les cheveux. Comment est-ce qu’on en arrive là ? Comment est-ce qu’on passe de « Non, pas besoin de me couper les pointes » à « Oui, coupez jusqu’à ce niveau » ? Et surtout, que ressent-on ? Je vais vous raconter tout ça.


Reset de près de 5 ans de pousse…

J’ai commencé cette aventure de pousse en 2018. Autant vous dire que les couper a été hors de question pendant une longue période. Mes cheveux, je les ai longtemps imaginés allant dans mon dos avec leur texture naturelle. Je ne compte pas l’investissement en argent, temps, énergie et autres ressources qui ont été mises à la disposition de leurs soins et de leur pousse. Hier pourtant, je me suis traînée moi-même chez le coiffeur (la coiffeuse) pour les couper — bas —.

La longueur actuelle est l’équivalent de près d’un an de pousse. De 2018 à 2024, faites le calcul de la longueur perdue en temps de pousse… On en a pour cinq ans, yay !

Même les plus forts soldats tombent…

Les personnes qui me connaissent savent à quel point j’aime ma touffe. Je suppose donc que la première question que les gens qui apprennent la nouvelle se posent, c'est : « Pourquoi ? Pourquoi est-ce que tu as coupé tes cheveux ? » Le choc doit être très vif puisque je l’ai fait sans préavis et sans en parler à pratiquement personne. Je me suis pointée du jour au lendemain et j’ai montré au monde entier ma tête dépourvue de plus de la moitié de ma longueur capillaire.

La vérité est que, si ce n’était pas hier, j’aurais peut-être coupé plus tôt, beaucoup plus bas. Entre nous, c’est une décision que j’ai ruminée pendant près d’un an. Je n’en ai pas parlé plus tôt parce que j’avais honte. J’ai fait une erreur de jugement qui m’a coûté la texture et la couleur noire corbeau de mes cheveux.

La veille de ma soutenance de licence, j’étais totalement fatiguée par les préparatifs. Je voulais juste être belle pour mon jour J, et une complication de plus m’aurait cassé. Alors, malgré mes doutes et mes questionnements, j’ai cédé à l’insistance de ma coiffeuse d’alors qui voulait appliquer un « produit sur les cheveux pour les assouplir sans changer la nature nappy ». Le seul type de produit à ma connaissance qui avait un tel effet était le masque hydratant.

La cliente à côté qui avait eu le soin trois fois selon ses dires, sans perdre sa texture naturelle, plaidait dans le sens de la professionnelle. Alors, j’ai laissé faire après quelques minutes de bataille. Effectivement, je n’ai pas perdu mes boucles. Par contre, elles étaient moins élastiques. J’ai tout de suite su que quelque chose clochait, mais sur le moment, je me suis dit : « C’est sûrement parce que le produit vient d’être appliqué. Une fois défaits, mes cheveux retrouveront leur apparence normale. » Ce n’est jamais arrivé.

Une relation d’amour-haine

Quand j’ai défait mon chignon quelques jours après ma soutenance, je l’ai vu du premier coup d’œil : « Quelque chose a changé, notamment devant. Mes cheveux n’étaient pas comme ça avant. Oui, les boucles sont toujours là et à vue d’œil, elles sont toujours naturelles, mais quelque chose cloche. » La différence était très frappante, devant particulièrement. Mes cheveux étaient plus fins que d’habitude, et leurs boucles n’étaient plus aussi élastiques qu’avant.

La première chose que j’ai pensée à ce moment-là, c'est : « Merde ». Je me suis retenue de pleurer devant le miroir parce que je devais rationaliser l’expérience. Vu que l’odeur du produit restait dans mes cheveux, cela voulait dire qu’il y en avait des résidus. Peut-être qu’après quelques lavages, tout reviendrait à la normale. Des semaines sont passées et, plusieurs shampoings et soins plus tard, mes boucles d’avant l’incident ne sont jamais revenues. Plus de trace olfactive du produit, donc je suppose que c’était ça de gagné.

Pendant les premières semaines, je l’ai très mal vécu. Je n’arrivais pas à regarder mes cheveux sans les regarder avec déception. Il m’a fallu me battre contre moi-même pour ne pas les haïr et me haïr par la même occasion. Il m’a fallu aussi du temps pour me pardonner cette erreur. J’ai dû m’empêcher de remettre en question tout ce que j’étais ou incarnais en tant que personne nappy.

Couper ou ne pas couper ?

Je me suis posée la question qui fâche très tôt. « Je coupe ou je ne coupe pas ? Je le fais quand, comment ? » Au début, je n’ai pas voulu me résigner à l’idée de couper. Si je devais le faire, je devais d’abord me réconcilier avec l’état de mes cheveux. Je devais apprendre à les aimer comme je le faisais avant l’incident.

Et puis, pour moi, ce n’était pas que « couper est hors de question ». En réalité, couper a toujours été une option, même avant l’incident. Au fur et à mesure que mon cheminement de pousse évoluait, je me suis retrouvée à me poser plusieurs questions sur cette éventualité. Et la question de la coupe s’est d’autant plus imposée quand, par un concours de circonstances malheureuses, une amie à moi a dû raser ses cheveux.

J’avais déjà questionné la place de ma chevelure dans ma perception de moi-même avant son expérience. Mais elle m’a fait me poser sérieusement pour avoir une entente plus profonde avec moi-même sur la question. « Est-ce que ma féminité ou ma beauté dépendent de mes cheveux ? Que ferais-je si je devais les perdre ? Le vivrais-je comme la fin du monde ? Ne devrais-je pas me préparer à l’éventualité ? »

Mon choix final a été évident, malgré la confusion et la réticence, parce que je m’étais posé ces questions précédemment et j’y avais répondu : j’allais bel et bien couper.

Bizarrement… Je le vis bien

Questionnements ou pas questionnements, tu ne sais jamais comment tu vivras le fait de prendre une décision radicale pour ta vie. Notamment quand cette décision te demande de reprendre un long chemin semé d’embûches qui a été au cœur de ta construction en tant que personne. Je ne l’ai d’ailleurs jamais caché : mon amour pour mes cheveux fait partie intégrante de mon histoire et de la construction de celle que je suis aujourd’hui.

Est-ce qu’il m’a fallu du courage pour accepter les coups de ciseaux qui me privaient d’une partie d’elle, de manière irréversible ? Oui, absolument. Les quelques larmes que j’ai coulées quand la coiffeuse a commencé à les couper en témoignent. Je savais que j’allais pleurer. C’est à quel point j’aimais mes cheveux, leur longueur, leur texture, et le fait de vivre avec.

Mais au fur et à mesure que je les perdais, j’ai compris qu’ils ne me définissaient pas. Dyva cheveux longs ou Dyva cheveux courts, reste Dyva. Évidemment, les couper aussi court après les avoir gardés longs pendant longtemps, je l’ai vécu comme un exorcisme. C’était une expérience presque spirituelle durant laquelle je n’ai pas pu m’empêcher de penser à ce que je perdrais.

Cependant, j’ai aussi pensé à toutes les choses que je gagnerais.

New cut, new me

Ça fait cliché à dire, mais « nouvelle coupe de cheveux, nouvelle moi ! » Comparativement à celle que j’étais à 15-16 ans, quand j’avais la longueur actuelle, j’ai plus de ressources pour prendre soin de mes cheveux. J’ai également plus d’expérience de la vie, et une maturité qui me serviront à vivre cette expérience de manière un peu plus intentionnelle.

J’ai eu le temps de mettre de côté mon obsession pour la longueur, et mon attachement pour un persona type. Alors, au cours de cette nouvelle expérience de pousse et de coupe —devenue une option très valable puisque j’ai ma touffe entre mes mains — , je vais me lâcher au maximum. Je vais me sentir forte, belle, féminine, dans tous mes états et dans toutes mes longueurs.

À 16 ans, puis à 18 ans, couper n’était même pas une option avant mon 25ᵉ anniversaire. Comme quoi, on ne peut jamais savoir ce que la vie nous réserve. Je me demande ce que les cinq prochaines années me réserveront, et je suis excitée à l’idée de les vivre. 

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