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Je ne suis pas ta maman !

2 août 2021

« Tu seras ma maman, tu seras ma chérie ». Fally Ipupa glisse ces paroles dans la chanson « Un coup » en featuring avec Dadju. Ce qui était censé être romantique à mon avis me déconnectera rapidement du reste de la chanson et nourrira divers questionnements en moi. Ce n'est pas la première fois que j'entends cette chanson, mais c'est peut-être la première fois que j'y accorde une attention différente et que je réalise certaines choses.

Mon cerveau se retrouve illuminé, et comme branchée à une nouvelle source d'énergie, je me retrouve ici, à écrire un article sur mon refus d'être la transposition du complexe d'Œdipe de qui que ce soit.

Hier, j'ai lâché inconsciemment « Je ne serai pas ta maman ! ». C'est à ce moment que beaucoup se demandent si je suis folle parce que Fally Ipupa ne m'entendra pas. C'est aussi à ce moment que mon cerveau se met à chauffer. Je prends peur, que j'ai des frissons et que je suis super mal à l'aise. Je me soucie peu de savoir si j'exagère ou si j'interprète mal ces deux phrases de la chanson. Je ne me donne pas le temps d'y penser parce que ma réflexion est allée loin, si loin que j'en ai déjà oublié la chanson.

Je me demande :

« Est-ce que certains de mes amis masculins voient en leur partenaire une maman de substitution ? »

En me référant à ce à quoi j'ai été souvent confrontée, notamment sur les réseaux sociaux, je serais tentée de dire oui. Ce n'est pas forcément eux, mais beaucoup d'autres. Et je ne comprends pas d'où vient le délire.

Entre nous, même si j'aime beaucoup mon père, je ne comparerais jamais mon futur homme à lui, et n'érigerait pas un homme qui lui ressemble en standard pour mon bonheur. Pourquoi ? Tout simplement parce qu'il est mon père. Et parce que je suis super différente de ma mère. 

Puis je pousse la réflexion un peu plus loin. Les hommes qui voudraient une femme comme leur mère, ont-ils en général une bonne relation avec leur père ? Je dirais, peut-être non. Et c'est là que le problème commence. Les gens n'y voient pas de problème parce que c'est récurrent, mais ça l'est. J'ai envie de développer le complexe d'Œdipe, mais j'ai la ferme conviction que cela va plus loin que ça à un niveau. 

Plus je me questionne sur les raisons qui pourraient pousser un homme à chercher une maman de substitution, moins j'ai envie de répondre à ce critère là. Du coup, cet article sera consacré à : 

« Pourquoi cela me blesserait, me briserait le cœur, m'outragerait et me détruirait peut-être si je me rendais compte que l'homme que j'aime ne m'aime que parce que je ressemble à sa maman ? ».

1. Ce n'est pas normal

Comment peut-on trouver normal qu'un homme aime sa femme parce qu'elle est une mini-version de sa maman à lui et pas vraiment pour ce qu'elle est elle-même ?

Vous ne le savez peut-être pas, ou peut-être si, mais j'ai une très forte opinion de moi-même. Je ne sais même pas où commence et s'arrête mon égo. Je suis juste consciente de sa présence et il motive souvent les actes de bravoure que j'ai. Écrire cet article par exemple, fait partie de la juridiction « égo d'Astrid » qui estime que du moment que j'ai une opinion que je peux défendre avec de bons arguments, elle est valable.

Alors voilà. D'où est-ce que je me sentirais bien si je dois me rendre compte que l'homme que j'aime ne m'aime pas parce que je suis Astrid Deva, avec tout ce que ça implique, mais parce qu'il a l'impression de voir en moi sa maman adorée ?

Beaucoup me diront qu'il n'y a pas de mal, que c'est une bonne chose, mais je dis « Non les gars, non ! ». Parce que quand cet homme me dira « Tu n'es pas celle que j'ai connu. Tu as beaucoup changé. Je n'arrive pas à te reconnaître », ou « Je croyais te connaître », j'entendrai « Tu ne ressemble plus à ma maman. Qui est cette femme oh mon Dieu ? ».

Ça fait tilt maintenant dans ton cerveau que je ne suis pas ta maman ? Et puis si tu m'aimes vraiment, d'où tu la projettes sur moi au fait ? 

2. C'est trop facile

Je dis carton rouge parce que je vois en face de moi un homme insecure et qui ne sait pas ce qu'il veut dans la vie. C'est vrai que nous avons tous des insécurités et des peurs. Et peut-être qu'au fait, une copie de sa maman, c'est exactement ce qu'il veut dans la vie, parce qu'elle lui a offert un modèle d'amour unique, et qu'il lui donnerait le ciel.

Mais je suis unique avec un package de sentiments et une expérience tous aussi uniques. M'utiliser comme copie, je trouve ça trop facile. C'est à se dire que tu ne t'es même plus demandé quel genre d'amour t'irait le mieux, et ce que tu attends d'une femme. Tu n'as pas beaucoup réfléchi. Tu aimes beaucoup ta maman, parce qu'elle t'aime beaucoup et tu te dis que si on se ressemble, je vais t'aimer de la même manière. Donc je suis un calque, une copie qui te permet de rester dans ta zone de confort.

Tu trouves ça normal parce que tu ne te pose pas de questions, et moi je dois vivre dans cette illusion avec toi, la nourrir et assumer le fait que si ça commence à péter, c'est que je n'irradie pas assez de la chaleur qu'elle t'avait donnée. D'accord. Bref, no.

3. Être la mère de substitution ? Beurk !

Pourquoi devrais-je offrir une mum's vibe si je suis sensée être la « compagne », la « partenaire », la « fiancée », la « femme », la « copine », la « petite-amie » ?

D'où est-ce que Astrid accepterait d'offrir une mum's vibe à un homme qu'elle aime ? D'où est-ce qu'il est normal qu'il me voie comme sa maman mais que je doive le voir comme mon homme ? Limite embrasse ta mère, couche avec ta mère, dis un je t'aime amoureux à ta mère. Ah oups, moralement c'est mal vu ! Du coup comme tu ne peux pas le faire, tu me choisis moi pour pouvoir ? MDR non.

Le rôle maternel et celui de partenaire, de compagne et j'en passe sont super différents et ne sauraient être mélangés. Tu me diras que tu aimes ta maman parce que c'est ta maman et qu'elle a super bien rempli ses devoirs de mère envers toi, mais vouloir me voir en elle, c'est quand même tout mélanger.

Je ne suis pas prête à faire partie de ce cocktail qui va devenir toxique à la longue, à moins que nous ne nous mentions à nous-mêmes, puis mutuellement sur le long. Avoir quelques traits de caractère similaires, why not ? Mais au point d'attendre de moi ce que tu attendrais de ta maman, non merci.

4. ça me fait peur

Si ce n'était pas assez clair avec les autres raisons, je tenais à le préciser. Il y a une chose. Si t'aimes autant ta maman, c'est parce qu'elle t'aime beaucoup aussi. Logique. Du coup, quand tu fais une bêtise, même si sur le moment elle se fâche ou s'énerve, tu seras toujours son fils pour qui elle ferait des mains et des pieds. Elle prendra toujours soin de toi, et voudra le meilleur pour toi. Elle te pardonnera parce que tu es son fils. Tu lis les dernières phrases là ? Voilà.

D'où est-ce que tu me mets cette responsabilité sur le dos ? Tu ne t'en rends pas compte, mais toi et moi on sait qu'à un moment, c'est ce que tu attends de moi. Le problème c'est que je ne tolère pas les foutaises. À partir du moment où tu merdes, rien ne garantit que mes sentiments pour toi resteront intacts, que je te pardonnerai et que malgré cela je ferais n'importe quoi pour toi.

J'ai mes limites et des choses que je ne supporte pas et n'étant pas ta maman, je n'ai pas vraiment obligation de supporter certaines choses au nom de l'amour. Mais quand toi tu me vois comme ta maman, mine de rien, tu t'attendrais à ce que j'aie pratiquement les mêmes réactions qu'elle et que mon amour soit aussi inconditionnel et aveugle que le sien.

C'est une trop lourde responsabilité à porter pour quelqu'un qui passe trop vite à autre chose quand la limite est franchie. Nous allons nous décevoir mutuellement et tu vas te créer des soucis psychologiques inutiles, et moi, bah ça me fait peur de faire partie de cela d'une manière ou d'une autre. 

J'en suis arrivée à la conclusion que si beaucoup d'hommes trouvaient normal que leur femme fasse tous les travaux de la maison et s'occupe des enfants même si elle a les mêmes horaires de travail qu'eux, que ce n'est pas juste de la misogynie mais que quelque part ce complexe d'Œdipe s'étend jusque-là et les empêche d'être rationnels.

Parce que j'ai l'impression quand les gens entendent maman, ils ne voient pas juste la douceur, la gentillesse ou le pseudo instinct maternel. Ils voient celle qui fait la cuisine, qui fait le ménage, qui crie beaucoup, s'essouffle. Ils voient celle qui s'occupe des enfants, qui a peu son mot à dire, et qui en toutes circonstances ne doit élever sa voix.

Elle est également celle qui les aime tellement qu'elle viendra les consoler malgré leurs bêtises. Elle va s'énerver mais c'est leur maman quoi — encore que toutes les mères ne sont pas comme ça —.

Il y en a qui ont vu leurs mères être maltraitées et les privilégier. Même s'ils disent vouloir une femme pour ce côté aimant qu'ils ont reçu, j'y vois aussi une réclamation du droit de faire souffrir la femme en question. « Je ne sais pas si je vais merder, mais si je merde, je sais qu'elle va me pardonner parce que c'est ce que maman ferait ». C'est malsain et non, je n'en veux pas ! 

J'ai d'autres raisons que je ne saurais évoquer ici, mais je crois que les quatre précédentes sont les principales. C'est la manière dont je vois tout ça. Cependant, si cela vous convient vivez votre vie telle que vous l'entendez. Et please, soyons heureux.


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